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Déclaration de la FSU au CTPD du 30 novembre 2010

Ce CTPD est essentiellement consacré au bilan de la rentrée 2010 et, malheureusement, en cette matière, nous n’avons rien à retranché du jugement que nous portions au moment de la préparation de cette rentrée, au CTPD du 1er avril 2010. Le temps étant compté, nous ne reviendrons pas sur les pertes sèches en nombre de postes qui se cachaient sous l’appellation de transformations et les installations de stagiaires sur des blocs de 18 heures. Nous annoncions que cela aurait pour conséquences des classes plus chargées, des conditions de travail et de remplacements dégradées Tout cela est largement confirmé depuis septembre.

Par contre, nous avons des choses à ajouter et elles n’embellissent pas le tableau. Elles tiennent au sentiment de lassitude et de démobilisation consécutif aux marques répétées de mépris envers la profession qui s’est installé dans les salles des professeurs.
Commençons par la lassitude. Elle atteint son maximum avec les stagiaires. Et là le terme de lassitude est un euphémisme car il serait plus juste de parler d’une grande fatigue. Dès le mois de septembre nous avons rencontré ces stagiaires et nous avons vu des collègues littéralement exténués par les effroyables conditions d’entrée dans le métier qui leur sont réservées, en particulier dans notre académie : 18 heures de services sur quatre jours avec tout à découvrir et une multitude de niveaux différents dont des classes d’examen. Nous savions que cela serait dur mais, même nous, ne  nous attendions à trouver des jeunes gens, pourtant dynamiques, volontaires et enthousiastes dans un tel état d’usure physique. D’ailleurs deux d’entre eux avaient déjà démissionné alors que la formation IUFM, le plus souvent organisée à Nantes, n’avait pas encore débuté. Qu’en est-il aujourd’hui ? Combien sont-ils à avoir du renoncer à une profession qu’ils aspiraient pourtant sincèrement à exercer ? Cette situation est intolérable et nous vous demandons solennellement, Monsieur l’Inspecteur d’académie que des solutions soient immédiatement trouvées pour améliorer les conditions de travail et de formation de ces jeunes collègues.

Mais la lassitude peut prendre un visage plus discret mais tout autant réel. Elle tient par exemple à l’inflation du nombre des compléments de service : pas moins de 6 pages dans les documents préparatoire à ce CTPD ! Comment voulez-vous dans ces conditions que les collègues s’investissent dans des projets et dans la vie des établissements. Pour beaucoup d’entre nous c’est le sens même du métier et les raisons pour lesquelles nous y sommes attachés qui s’évanouissent peu à peu.
Dans le même ordre d’idée, la lassitude et la démobilisation viennent également de la multiplication des injonctions à effectuer des actes pédagogiquement absurdes. Cela a commencé avec la note de vie scolaire puis ont suivi la validation du niveau A2 en langue, du B2i et de l’épreuve d’histoire des arts, purs moments de mascarade, compte-tenu du flou des cadrages nationaux et de la fantaisie des procédures locales. Aujourd’hui ces prolégomènes sont couronnés par la mise en place du livret individuel de compétence. Le Snes-FSU dénonce ce dispositif et il en a relevé à plusieurs reprises l’absence de pertinence, voire la dangerosité : vision parcellaires des tâches, reculs des savoirs à enseigner, segmentation des acquisitions qui empêche de donner du sens aux apprentissages, formatages des individus à une norme comportementale… Il ne peut accepter une telle transformation du collège qui tourne le dos à la démocratisation de l’accès au baccalauréat et aux qualifications de haut niveau du fait d'un enseignement à deux vitesses : le socle commun pour les élèves éloignés des codes culturels dominants, les hautes études pour les enfants d'une élite sociale soucieuse d'assurer sa reproduction sans trop de renouvellement.
Mais au delà de cela, le Snes-Fsu estime que l'évaluation par compétences remet en question la reconnaissance même du Diplôme, seule garante, en France, d'une grille salariale collective. La gestion par compétences intéresse le patronat car elle permet d'individualiser à l'extrême les situations et de tirer ainsi les salaires vers le bas.
Aussi le SNES 72 relaiera-t-il l’appel du Snes national à ne pas renseigner ce livret, ni maintenant ni au 2ème trimestre, en espérant que le Ministre accepte d’ici la fin de l’année un débat sur la pertinence du livret.

La lassitude vient enfin de la succession des simulacres de consultations au cours desquelles leur parole n’est en définitive jamais prise en compte. La dernière en date concerne les rythmes scolaires. Pourquoi reparle-t-on aujourd’hui des rythmes scolaires ? Parce qu’en 2008 le chef de l’Etat a décidé seul, contre l’avis même de son ministre de l’Education de l’époque, si l’on en croit ce dernier, qu’il fallait de toute urgence en finir avec les cours du samedi matin dans le premier degré. Moyennant quoi les cours et les programmes inchangés se sont retrouvés concentrés sur quatre jours. Les dégâts ont été tels que des institutions aussi vénérables que l’Académie de médecine ont du publier dès le printemps 2010 un rapport établissant ce que toute personne un peu sensée subodorait à savoir que cette nouvelle organisation de la semaine scolaire ne respectait absolument pas les rythmes de l’enfant et qu’elle lui était néfaste.
Avant même cette nouvelle « grande consultation » des voix plus que qualifiées pour prendre la parole se sont donc déjà faite entendre et si ce gouvernement était vraiment à l’écoute de la nation, il aurait déjà du faire marche arrière.
Ceci aurait tendance à nous laisser dubitatif quant à la véracité de son désir de prendre avis et d’en tirer les conséquences qui s’imposent dans l’intérêt de l’enfant. Et ce doute ne peut être que renforcé lorsque l’on considère l’ensemble de la politique éducative menée depuis 2007. Entre cette date et aujourd’hui, plus de 80 000 postes ont été supprimés dans l’Education nationale. Qui pourrait croire que ces décisions ont été prises en pensant à l’intérêt de l’enfant ?
Le doute quant à la bonne foi des intentions est tel qu’on en vient même à penser que, derrière cette attention aux rythmes scolaires se dissimulent même une tentative pour supprimer encore plus de postes. L’expérimentation maladroitement nommée « cours le matin, sport l’après midi » ne laisse-t-elle pas en effet entrevoir qu’il serait finalement possible à terme d’externaliser les activités sportives et culturel de l’après midi voire de les laisser entièrement à la charge des familles. Ce serait autant d’économie pour l’Etat qui calquerait ainsi l’organisation scolaire française sur le modèle allemand… au moment où l’Allemagne en dresse un bilan plutôt négatif.
Alors dans ce contexte on peut toujours formuler des vœux qui n’ont d’ailleurs rien de bien nouveau, ayant été énoncés il y a plus de quarante ans pour certains. On peut ainsi réaffirmer après tant d’autres qu’il serait préférable que l’année scolaire observe une alternance de 7 semaines de cours suivies de 2 semaines de vacances. Mais y avait-t-il besoin d’une « grande consultation sur les rythmes scolaires » pour découvrir cela ? Ce gouvernement aura-t-il le courage d’affronter les lobbies économiques du tourisme pour imposer un dispositif dont ils sont déjà venus à bout à plusieurs reprises ?

Enfin, et c’est une nouveauté, ce CTPD de novembre doit également aborder la question de la préparation de la prochaine rentrée. Ce que nous en savons pour le moment c’est que le prochain budget annonce encore 16 000 suppressions de postes pour l’an prochain et ce rythme devrait se poursuivre jusqu’en 2013.  Avec de telles données, il y a malheureusement fort à parier que nous n’ayons d’autres choix que d’apparaître comme des radoteurs et devoir redire ce que nous disions en avril dernier : les conditions de travail et la qualité du service public vont encore se dégrader.

Le Mans, le 30 novembre 2010

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