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L’internat de Soudun cède à la mode… de l’uniforme !

L’établissement d'excellence, piloté par un proche de l'UMP, a décidé de mettre en œuvre cette mesure.

Jupe ou pantalon noir et chemisier blanc pour les filles, pantalon noir, chemise blanche et cravate pour les garçons... L'internat d'excellence de Sourdun a cédé, depuis hier, à la dictature de la mode. Pas celle, si commune, des jeans taille basse et autres casquettes sous-dimensionnées. Mais celle élaborée par les couturiers de l'UMP qui, depuis des mois, prônent un retour de l'uniforme dans les établissements scolaires. L'établissement de Sourdes, tête de gondole de la politique scolaire sarkozyste, a donc décidé d'endosser le costume. Et, une fois de plus, d'attirer à lui les caméras en cette période de campagne électorale.

L'affaire n'est pas une surprise. Et fleure bon le coup politique. Depuis octobre, le directeur de l'internat, Bernard Lociciro, mène le débat tambour battant. Il le fait d'alitant plus vaillamment qu'il se trouve être également, à ses heures perdues, le maire adjoint (délégué à l'emploi, à la formation et à l'insertion par l'économie) de la bonne ville de Meaux, dirigée par un certain Jean-François Copé, patron de l'UMP, qui a fait de l'instauration du port d'un « vêtement commun » dans les écoles, collèges et lycées, l'une de ses propositions de campagne...

Notre homme n'est donc pas né de la dernière pluie. Et n'avait pas trop de crainte lorsqu'il a organisé, cet automne, un référendum — « Pour ou contre l'uniforme ? » — auprès des familles et élèves, où le oui l'a emporté à 75 %. Alors que l'heure est à la pénurie pour la plupart des établissements de l'éducation nationale, l'internat de Sourdun, lui, ne semble pas avoir eu le moindre souci pour débourser les quelque 70 000 euros que lui coûtent ces beaux atours (270 euros par élèves, dont 80 euros pris en charge par les familles) expédiés aux 369 élèves pendant les vacances. La dictature du marketing politique est sans doute à ce prix...

Sur le fond, le discours de notre directeur ne manque pas de piquant. Selon lui, « l'uniforme peut donner une forme d'égalité aux élèves dans leur scolarité ». Un argument que balaient tous les connaisseurs du monde éducatif qui parlent « d'écran de fumée destiné à masquer le creusement des inégalités scolaires depuis cinq ans avec la suppression de 80 000 postes ou encore l'assouplissement de la carte scolaire ». Même la fédération de parents d'élèves Peep, plutôt proche de la droite, n'y voit pas « une bonne solution ». « Ce n'est pas en essayant d'effacer les inégalités sociales qu'on fera en sorte que les élèves respectent ces différences », souligne Valéry Marty, la présidente de la fédération.

Le comble pour notre directeur reste, sans doute, de se piquer « d'égalité entre élèves », alors que le principe même des internats d'excellence est de sélectionner sur dossier les élèves « méritants » qui peuvent prétendre y entrer... La ficelle de l'uniforme est grosse.

LAURENT MOULOUD

L'Humanité - Edition du 6 mars 2012

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