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En mettant en avant les chiffres de 10 ETP supplémentaires en collèges et de 17 en Lycées, la rentrée 2013 nous a été présentée comme placée sous le signe du début du changement annoncé.

Il s'agit certes d'une inflexion par rapport aux dix années écoulées. Mais, pour en prendre l'exacte mesure, il convient cependant de la mettre en regard d'un certain nombre de considérations.

Tout d'abord cette embellie dans les dotations fait suite à une période de véritable saignée. Il n'est pas besoin de remonter très loin en arrière pour le constater. Les pertes cumulées des rentrées 2011 et 2012 s'élèvent à elles seules à 13 postes en collèges. La réintroduction de 10 postes à la rentrée 2013 laissera donc tout de même un déficit de 3 postes par rapport à la rentrée 2010.En définitive la prochaine rentrée sera donc encore placée sous le signe de la pénurie et de moyens toujours largement insuffisants. Et ce constat chaque établissement a pu le faire. En écoutant les collègues, ce n'est ni l'enthousiasme ni l'euphorie qui l'emporte mais bien l'agacement de devoir une fois encore bricoler avec des bouts de chandelles, quitte à arriver à des résultats plus que bancales.

Même quand les CA des collèges arrivent à construire des répartitions prévoyant des groupes en sciences sur les niveaux les plus chargés et à maintenir le latin dans le respect des volumes horaires qui lui sont dus, à empêcher les tentatives de déstabilisation du sport scolaire de 3 heures par enseignant, les collègues ne peuvent tout de même pas s'empêcher de penser aux dégradations subies. Il y a dix ans les disciplines avaient certes été amputées d'une partie de leurs volumes horaires mais cela avait servi à abonder les IDD. Il existait des seuils de dédoublements et la présence du latin allait de soi.. Aujourd'hui les IDD ont disparu mais les disciplines n'ont pas retrouvé leurs horaires initiaux et nous nous estimons heureux quand nous parvenons à décrocher, au prix de mobilisations éreintantes, ce qui n'était alors que le strict minimum garanti.

En lycée, les classes continueront à être surchargées avec un peu partout 35 élèves. Le manque de moyens interdit généralement les dédoublements indispensables en LV2 ; les collègues doivent s'évertuer à faire vivre leur langue avec des groupes de 28 ou 30 élèves ! Le même manque de moyens aboutit parfois à organiser l'Accompagnement Personnalisé (par ailleurs assez largement rejeté par les collègues) en demi-classe voire même en classe entière ! Où est la personnalisation tant chantée ? Même logique de gestion d'une pénurie insupportable qui amène des chefs d'établissement à fondre dans un même groupe des latinistes de Premières et de Terminales. Les collègues de Lettres Classiques s'estimant heureux de sauver ce qui peut encore l'être ! Au total, des moyens très insuffisants et qui le restent pour permettre le financement d'une réforme des lycées très décriée et dont les résultats positifs restent encore très largement à démontrer.

 En lycée professionnel, les élèves de 3ème prépa-professionnel font eux aussi figures d' oubliés de la rentrée, le dispositif académique de dotation horaire complémentaire n'ayant pas été reconduit. Ce volant d'heures (13h pour une classe de 24 élèves) permettaient de traiter les difficultés (scolaires, sociales...) importantes de ce public. La circulaire académique reconnaît que cette classe « ... nécessite une mobilisation de l’ensemble de l’équipe pédagogique à travers une réflexion pluridisciplinaire et une approche individualisée des besoins de formation des élèves... » Mais comment répondre aux besoins de ces élèves à 24 ? La même circulaire répond par une diminution des horaires disciplinaires par élève. Mais cela n'est pas encore suffisant. Pour répondre aux difficultés de ce public, les proviseurs utilisent aussi une partie du volume horaire complémentaire de bac pro. Au final, nous sommes dans une situation où nos élèves de troisième n'ont pas la totalité des heures et nos élèves de bac pro n'auront pas la totalité de leur formation.

Décidément, nous espérons qu'il ne s'agit effectivement que d'un début, car il faudra beaucoup plus que ces premiers gages pour retrouver des conditions acceptables d'enseignement.

En outre ces dotations supplémentaires doivent être relativisées d'une autre manière. En collèges 10 ETP supplémentaires sont annoncés, 17 en lycées. Mais entre les suppressions et les créations de postes, on ne constate dans un cas qu'une variation positive de 4 et, dans l'autre de 9. D'où une interrogation sur l'écart entre les moyens annoncés et l'augmentation du nombre de postes constatée.

De deux choses l'une. Soit les moyens supplémentaires alloués n'ont pas tous été utilisés, ce qui constituerait une belle aberration dans un contexte où les établissements ne parviennent à construire leurs répartitions qu'au prix de numéros d'équilibristes mal assurés. Et si ces moyens supplémentaires devaient être rendus, nous sortirions du domaine de l'aberration pour entrer dans celui de la farce.

Ou alors la différence est comblée par des heures supplémentaires et une augmentation des BMP qui développent la précarité. Le tout équivalant à six postes en collèges et à huit autres en lycées. Autrement dit, le volume de ces heures représenteraient la bagatelle de 14 emplois dans ce département, réalité également choquante.

Les heures supplémentaires sont des emplois en moins et au moment où le chômage dépasse tous les niveaux jamais atteints, cette donnée doit nous interpeller. Nous savons bien, en même temps que l’Éducation n'arrive même plus à pourvoir les postes mis au concours et en l'absence de revalorisation salariale, il est fort douteux que les prochaines campagnes de recrutement réussissent à faire le plein, quoiqu'en dise M. Peillon.

Mais les heures supplémentaires, c'est aussi de la fatigue en plus. Et tôt ou tard cette fatigue se paie. Passé 55 ans beaucoup de nos collègues sont littéralement usés ce qui entraîne des problèmes lourds de souffrance au travail. Et la perspective d'un nouveau recul de l'age du départ en retraite n'est pas de nature à nous rassurer. Raison de plus pour prendre sérieusement en compte dès maintenant cette problématique, surtout quand des cas individuels sont signalés. Ne pas le faire, c'est prendre des risques potentiellement lourds de conséquences.

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