Depuis le mois d'avril bien des choses se sont passées : Emmanuel Macron a été réélu au printemps dans les circonstances que l’on sait et, tout dernièrement, les élections législatives l’ont privé de majorité absolue.
Cette longue séquence a scellé le destin politique de Jean-Michel Blanquer : ancien chouchou des médias et de la Macronie devenu boulet politique, Blanquer a été éjecté sans ménagement du nouveau gouvernement et les électeurs du Loiret lui ont permis de prendre conscience de sa réelle popularité. Battu dès le premier tour, il a bien tenté de contester les résultats mais, cette fois, impossible de nier la réalité comme il le fit si souvent (« on se contamine moins à l’école qu’ailleurs »), impossible de tripatouiller les résultats afin de les rendre plus favorables (comme lors du baccalauréat de 2020), impossible de se défausser sur quelqu’un d’autre (les méchants hackers qui paralysent les ENT de l’Éducation Nationale). Mauvais ministre, mauvais candidat, mauvais perdant, Blanquer quitte la scène politique en laissant derrière lui, après 5 longues années, une Éducation Nationale profondément traumatisée.
L’effondrement du nombre de candidats aux concours signe le bilan catastrophique de Blanquer : on ne veut plus devenir enseignant aujourd’hui dans ce pays. La rentrée prochaine s’annonce sous de biens mauvais auspices et la question de savoir s’il y aura assez de professeurs à mettre devant les élèves se pose sérieusement.
Comment s’en étonner lorsque le point d’indice reste désespérément gelé alors même que l’inflation s’envole ?
Comment s’en étonner alors que des milliers de postes ont été supprimés alors même que les effectifs du second degré augmentaient, alourdissant les effectifs des classes ?
Comment s’en étonner alors que les enseignants sont en permanence méprisés dans leur professionnalisme ; constamment en butte à une hiérarchie convertie aux vertus du neo-management autoritariste et maltraitant ?
Comment s’en étonner lorsque les réformes les plus absurdes sont imposées contre l’avis majoritaire des enseignants ?
L’École va mal et les enseignants vont mal. Là est le vrai bilan de Jean-Michel Blanquer.
Son successeur, Pap Ndiaye, est estimable et nous évitera au moins les délires blanquéristes sur l’islamo-gauchisme et le wokisme. Mais il est difficile de lui faire confiance lorsque nous voyons qu’il annonce l’organisation de grands débats dans les établissements scolaires dès la rentrée « pour repenser le métier d’enseignant ». Nous en avons soupé de toutes ces grands-messes si caractéristiques du macronisme qui n’ont d’autre objectif que d’imposer des décisions déjà prises sous couvert de dialogue et de concertation. Le dernier « Grenelle de l’Éducation » a été une pitoyable pantalonnade, boycottée par la FSU, où des personnes étrangères au monde de l’éducation (un ancien rugbyman, un DRH… ont doctement humilié les enseignants en leur expliquant leur métier. Quant aux bénéfices pour les enseignants, nous attendons toujours et nous risquons d’attendre fort longtemps !
Si le nouveau ministre veut savoir ce que pense la profession, rien de plus facile : dans chaque établissement il existe des conseils d’administration où les élus du personnel font entendre la voix des collègues, rédigent des motions, expliquent leurs votes. Tout cela est consigné sur des PV qu’il suffit de lire.
Signalons également à PAP Ndiaye qu’il existe aux niveaux départemental, académique et national des organisations syndicales représentatives qui ne cessent de relayer les demandes du terrain. Il suffit de les écouter et de les entendre. Dans le souci de faire gagner du temps à tout le monde, le SNES-FSU, principale organisation syndicale du second degré, rappelle ses revendications les plus urgentes :
- une revalorisation immédiate et sans contrepartie d’aucune sorte. Il faut que le point d’indice soit immédiatement dégelé et que soit mise en place une politique de revalorisation réelle de nos métiers. Aucun enseignant, CPE, Psy-EN ne doit débuter sa carrière avec moins de 2 000 euros et aucun AED ou AESH ne doit commencer à travailler, pour un temps plein, à moins de 1 850 euros. Sans cela, nos métiers continueront à ne plus attirer.
- l’organisation d’un concours exceptionnel et l’utilisation des listes complémentaires afin de recruter rapidement et massivement des enseignants. Il en va de la faisabilité de la prochaine rentrée. Plus globalement, il faut entièrement revoir les conditions d’entrée dans le métier : exercer à plein temps lors de son année de stage peut être effrayant pour beaucoup.
- remettre totalement à plat la réforme du lycée et du baccalauréat, source de désorganisation profonde dans les établissements, et supprimer Parcoursup, système de triage social des élèves qui est un véritable scandale.
- il faut très rapidement se donner les moyens d’alléger les effectifs pléthoriques, tout particulièrement en collège. Il ne doit pas y avoir plus de 24 collégiens par classe (20 en éducation prioritaire) et les dédoublements doivent devenir la norme.
Ces premières mesures seraient, aux yeux du SNES-FSU, les seules à pouvoir rétablir la confiance entre la profession et le ministère. Nous sommes lucides et savons bien que la conjoncture politique n’est guère favorable mais nous ferons tout pour porter ces revendications pour le bien des collègues et des élèves.
Plus que jamais le SNES-FSU est déterminé à faire entendre haut et fort la voix de professions malmenées, méprisées, humiliées pendant 5 longues années. Nous aurons besoin de vous, de votre soutien pour continuer à vous défendre, à défendre l’École républicaine à laquelle nous croyons toutes et tous. Nous aurons besoin de toutes nos forces à la rentrée. Donc, d’ici là, bonnes vacances à toutes et à tous !