La fin des années fastes pour l’apprentissage ?
Considéré comme la voie royale vers l’insertion professionnelle, l’apprentissage a connu un essor fulgurant, avec un record de 1 021 500 apprentis en France atteint en décembre 2023 (soit + 130 % par rapport à 2018), selon les chiffres du ministère du Travail. C’est le résultat d’une politique décidée au sommet de l’État. Car l’apprentissage est un des leviers majeurs sur lesquels misaient les derniers gouvernements pour atteindre le plein-emploi.
« Avoir un vrai contact avec le métier »
Les étudiants y trouvent leur compte : selon les chiffres communiqués par la Dares en juillet, 71 % des anciens apprentis de CAP à BTS occupent un emploi deux ans après leur sortie d’études, contre 55 % pour les étudiants en « voie scolaire ». « Les apprentis sont en contact avec le monde de l’entreprise et ses règles. Ils peuvent adopter une démarche de recherche d’emploi plus efficace », analyse la chercheuse au Céreq Marie-Hélène Toutin-Trelcat. Alors qu’elle s’apprête à réaliser sa rentrée en mention complémentaire de pâtisserie, Margaux Viallard approuve : « En apprentissage, on est formés à s’intégrer dans une entreprise. » La jeune fille de 18 ans, déjà deux CAP en poche, n’a connu que l’apprentissage : « Je ne pouvais pas rester assise toute la journée sur une chaise. L’alternance permet d’avoir un vrai contact avec le métier. »
Seulement, les années fastes de l’apprentissage semblent prendre fin. La Fédération nationale des directeurs de CFA (Fnadir), selon les mots de son délégué national Alban Margueritat, n’est pas « confiante quant à une croissance des effectifs à la rentrée ».Une baisse pourrait même être observée dans plusieurs établissements. Depuis 2022, les aides versées aux Centres de formation d’apprentis auraient baissé d’environ 10 %, estime Alban Margueritat. Certains ne seraient donc plus en mesure de financer l’ensemble de leurs formations. Toujours maintenue depuis sa mise en place après la crise Covid, « l’aide exceptionnelle » destinée aux entreprises formant des apprentis pourrait également être revue à la baisse dans le prochain budget adopté par le futur gouvernement.
Tout en soulageant les dépenses publiques, la baisse de ces aides permettrait d’éviter « l’effet d’aubaine » dont profitent certaines entreprises. « L’apprentissage a pu devenir une manière d’avoir de la main-d’œuvre très peu chère, avec des entreprises qui ne prennent pas en charge leur mission de formation », avance Marie-Hélène Toutin-Trelcat. Ces dérives pourraient expliquer en partie l’importance du taux de ruptures de contrats d’apprentissage, autre tache sur la copie sans faute du dispositif. Selon une étude de la Dares, celles-ci ont concerné plus de 20 % des contrats commencés en 2022, qu’elles soient à l’initiative des jeunes ou des entreprises.
Tom SALLEMBIEN.
Lundi 2 septembre 2024, Ouest-Feance