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La nouvelle rectrice de l’Académie de Nantes prend ses fonctions en pleine crise des vocations enseignantes. Pour elle, la région semble plus épargnée que bien d’autres.

Entretien

Vous prenez ce nouveau poste en pleine pénurie nationale de professeurs, faute de candidats aux concours. Avez-vous connu une telle crise des vocations ?
Il y a déjà eu des fluctuations dans la participation aux concours. Actuellement, d’autres opportunités peuvent s’offrir à des jeunes diplômés à bac +5, c’est indubitable. La peur du chômage est moindre. Le mobile de sécurité de l’emploi a quasiment disparu chez les jeunes étudiants et certains trouvent dans le privé des rémunérations plus intéressantes. C’est marqué par exemple dans les disciplines professionnelles (enseignement technique). Mais il y a aussi un effet mécanique vraiment inédit cette année, puisque le moment de passation du concours d’accès au métier d’enseignant a été déplacé.

C’est-à-dire ?
Auparavant, les candidats passaient le concours à la fin de leur Master 1. Mais au printemps 2022, les candidats l’ont passé à la fin du Master 2. Donc parmi tous les élèves de cette cohorte de M2, une majorité l’avait déjà passé l’année d’avant.

Le décalage se traduit comment, pour cette rentrée, en Pays de la Loire ?
Au niveau du secondaire, il nous faut trouver cent postes de contractuels en plus, dans le public, par rapport à l’année précédente.

Et globalement, combien de postes à pourvoir ?
Je ne peux pas vous le dire à l’heure actuelle. Je suis allée voir hier notre cellule de rentrée : elle tournait à plein régime avec dix personnes au téléphone avec des contractuels, mais aussi des titulaires (professeurs 1rer année) qui souhaitent une affectation précise. Mais, évidemment, nous devons faire en sorte qu’il y ait des professeurs partout. Quand il s’agit des écoles, c’est encore plus tendu : les familles ont besoin d’être rassurées, dans la mesure où il s’agit d’un professeur unique.

Comment ?
Nous mobilisons en partie la liste complémentaire (des personnes qui ont raté de peu le concours d’entrée). Mais Nantes est une académie attractive, je le mesure en arrivant, par comparaison avec celle du Centre-Val de Loire. La pénurie de candidats est beaucoup moins aiguë qu’ailleurs, même si je ne donnerais pas ma main à couper qu’on aura tous les professeurs de technologie, tout de suite…

Y compris dans le privé ?
Il a sa propre organisation de recrutement qui fonctionne très bien. Après, ce sont nos services qui valident les postes du privé sous contrat.
On voit aussi voit fleurir des offres sur Pôle emploi…
Utiliser ce réseau nous permet de trouver des contractuels intéressés par la proximité, notamment en secteur plus rural. Après, les candidatures sont examinées comme il se doit, avec un entretien. Il n’y a pas de job dating ici.

Certaines offres surprennent : 21 heures de cours par semaine, avec toute la préparation qu’elles supposent, bac +3 et débutants acceptés, 1 360 € Net… Ça ne vous choque pas ?
C’est un vrai problème, dont le ministre (Pap Ndiaye) a parfaitement conscience. Il a encore récemment parlé de la revalorisation financière des enseignants. On a monté le niveau des qualifications et les salaires sont en décalage. Mais il s’agit aussi de la considération que la société doit aux enseignants. Ils viennent de tenir durant deux dures années de crise sanitaire. Avec des protocoles à appliquer, etc. […] Cette rentrée, on part sans restriction. C’est déjà un meilleur point de départ. Cette crise a ébranlé les élèves et les personnels. Leur bien-être est une priorité de rentrée. On va faire en sorte d’être très à l’écoute et de régler les problèmes très vite.

L’écoute ? Pour pas mal de d’enseignants, le maître mot de leur administration, c’est plutôt « pas de vague »…
C’est dommage que cette » croyance persiste parce que justement, le « pas de vague », on le récuse ! Le Rectorat de Nantes travaille pour que chaque établissement ait un interlocuteur unique. Qu’une personne réponde à leurs besoins, plutôt que de passer par tous les services.

Faute de candidats partout en France, il n’y aurait que 20 admis dans les Pays de la Loire, au Capes de Maths. Ça va suffire ?
Oui. Paradoxalement, c’est une discipline où il y aura moins de tension ici, malgré le fait qu’on rajoute 1 h 30 de mathématiques dans le tronc commun du lycée général. Parce que le nombre d’élèves volontaires n’est pas très élevé. On verra ce que ça donnera en 2023, quand ces 1 h 30 deviendront obligatoires.

François CHRÉTIEN.
Jeudi 25 aout 2022, Ouest-France

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